Une performance ! C’est le PCAET le moins contraignant et le moins cher de France…
Totalement désolant

La loi du 8 novembre 2019 prévoit de réduire de 40% nos émissions de gaz à effet de serre à l’horizon de 2030. L’Union Européenne envisage actuellement d’assigner à la France une cible plus ambitieuse encore. Cela signifie qu’en moins de deux mandats municipaux, il nous faudra réduire de près de moitié nos émissions de gaz à effet de serre.
Cet objectif ne pourra être réalisé que si les collectivités territoriales s’engagent drastiquement dans l’isolation des bâtiments publics, la promotion des mobilités douces et des transports collectifs, la production d’énergie renouvelables notamment en développant les réseaux de chaleur alimenté par la biomasse et les biogaz ; l’économie circulaire en promouvant le recyclage des déchets et la récupération de la chaleur fatale, l’offre d’une alimentation collective locale, biologique moins carnée, des achats responsables et limiter l’artificialisation des sols.
Le code de l’environnement oblige les Collectivités territoriales à réaliser un Plan Climat Air Energie territorial pluriannuel fixant des objectifs de réduction des émissions de GES, de la pollution, des atteintes à la biodiversité et un programme d’action.

Les objectifs du PCAET de la CU GPS&O consistent principalement à :

réduire la consommation énergétique de 36% d’ici 2050;
réduire les émissions de gaz à effet de serre de 64% d’ici 2050;
porter la part des énergies renouvelables (EnR) à 20% d’ici 2030 et 40% d’ici 2050;
réduire les émissions de polluants atmosphériques de 55% d’ici 2030 et 71,5% d’ici 2050.

 Pour atteindre ces objectifs, la CU GPS&O a conçu un programme d’actions autour des axes suivants:

AXE 1

Promouvoir la sobriété et améliorer la performance énergétique et climatique des bâtiments;

AXE 2
Développer une mobilité adaptée à la diversité de l’espace et respectueuse de l’environnement et de la santé;

AXE 3

Développement les énergies renouvelables sur le territoire;

AXE 4

Développer une économie durable et inclusive, en mobilisant les acteurs économiques, les collectivités et les citoyens du territoire;

AXE 5

Accompagner l’évolution des modes de production agricoles et d’alimentation et adapter le territoire aux changements climatiques. 

Ce programme se décline en 44 actions, avec une échéance moyenne de cinq ans, incluant une évaluation à mi-parcours avec production d’un bilan intermédiaire.

 

Le document se fixe des objectifs de résultats sans obligations de moyens.

Comme le note l’autorité environnementale : « L’objectif d’augmentation de la part des énergies issues de sources renouvelables ne satisfait pas l’ambition de neutralité carbone portée la loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat. Le projet de PCAET manque ainsi d’ambition vis-à-vis de l’atteinte des objectifs d’augmentation de la part d’énergie renouvelable et de réduction des émissions de gaz à effet de serre »

Le bilan carbone réalisé pour les besoins du PCAET est instructif.
La production d’énergie renouvelable sur le territoire représente 2,7% de la consommation finale, ce qui est très inférieur à la moyenne nationale (16%) et en deçà des objectifs fixés par la loi (20%)
Les estimations tendancielles des consommation d’énergie (p10, stratégie territoriale) montrent que le peu de réduction obtenue est le fait des ménages et de l’industrie. Les émissions de transport et du tertiaire n’ont pas diminué, ce qui montre l’inaction des autorités locales en la matière.
A priori, les émissions de GES devraient diminuer de 31% au rythme actuel entre 2012 et 2050 (p11, stratégie territoriale) ce qui est très insuffisant au regard de l’objectif de neutralité carbone fixé par la dernière version de la Stratégie Nationale Bas carbone (SNBC).
La stratégie prévoit au total, une réduction des 2/3 des émissions de GES. Or La loi de 2019 prévoit de les diviser par 8,5 à l’horizon 2050. Le scénario de transition prévoit la production de 17% de nos besoins énergétiques en 2030 par des ENR et 40% en 2050. C’est très insuffisant. Le Grenelle de l’environnement prévoyait déjà de produire 20% d’ENR en 2020… La CU ne compte même pas atteindre cet objectif en 2030.
Plus globalement, comme le note l’Etat : « Les potentiels de réduction des consommations d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre n’ont pas été évalués globalement ou par secteur; (…). L’évaluation des potentiels de réduction est requise par la réglementation: il doit donc en être fait mention, ou précise si les objectifs fixés par la stratégie permettent d’exploiter l’ensemble des potentiels sectorisés » (Synthèse de l’Avis de l’Etat , p1)

Concernant la pollution de l’air, le document ne propose quasiment rien en matière de lutte contre la pollution de l’air, au point que la Préfecture « recommande d’une part de mieux intégrer les actions préconisées par le PPA et sa feuille de route, et d’autre part d’établir des actions de réduction de l’exposition de la population à une mauvaise qualité de l’air, particulièrement des actions d’aménagement en lien avec les documents d’urbanisme. » (Synthèse de l’Avis de l’Etat , p4)

AXE 1 ›› Promouvoir la sobriété et améliorer la performance énergétique et climatique des bâtiments;

L’axe 1 ne comporte aucune mesure concrète à l’exception de la création d’une « plateforme de la rénovation et de la transition énergétique ». Or un tel dispositif existe déjà, c’est le SARE (Service d’accompagnement à la rénovation énergétique, qui a pris le relai des espaces info énergie (animé par l’association « énergies solidaires » en partenariat avec l’ADEME).
Pour le reste, la CU ne prévoit que des opérations de sensibilisation. Aucun investissement n’est prévu (à l’exception de 250 000€ pour le développement de la plateforme).
Le document fait totalement l’impasse sur le tertiaire privé.
Le document ne prévoit même pas de calendrier prévisionnel d’isolation des bâtiments publics qui relèvent de la compétence de la CU (comme les piscines etc..).
S’il évoque une modification de la règlementation, il n’avance aucune recommandation concrète, ce que déplore l’Etat : « le PLUi pourrait évoluer afin de favoriser la rénovation énergétique des bâtiments par l’extérieur, en autorisant un dépassement des règles relatives au gabarit pour les constructions faisant preuve d’exemplarité énergétique, et en imposant des exigences énergétiques fortes pour les bâtiments situés en secteur EcoQuartiers ». (Synthèse de l’Avis de l’Etat , p2)
Le document prévoit de créer moins de 5 emplois équivalent temps plein (etp) sur ce volet…

 

AXE 2 ›› Développer une mobilité adaptée à la diversité de l’espace et respectueuse de l’environnement et de la santé

Cet axe ne porte que sur des actions de sensibilisation. Le plan vélo de 2019 est évoqué, mais aucun investissement supplémentaire n’est prévu en dehors des « actions en cours » qui ne sont pas listées… idem pour le développement des transports collectifs.
Ainsi, le développement du réseau cyclable n’est pas cartographié, ni budgété. Il n’est prévu aucune subvention à l’achat de vélo électrique.
Il faut intégrer dans le plan d’action des synergies notamment avec la CA de Cergy Pontoise et la CA de St Germain en Laye Boucles de Seine, concernant le développement des mobilités douces du type construction et/ou rénovation de pistes cyclables et de chemins piétonniers.
Il n’est pas fait mention d’investissement dans la piétonisation de la voirie.
Pour le développement du Gaz naturel de Ville (GNV), il est prévu d’établir un schéma directeur, pour la modique somme de 50 000€, sans qu’il soit prévu que la CU se dote d’une flotte de bus roulant au GNV (il existe pourtant deux stations de GNV aux Mureaux et à Limay)
Les modes de transports à l’hydrogène sont à peine cités.
Il n’est pas prévu que la CU investisse pour l’implantation de bornes électriques… La fiche d’action 2.6 n’est qu’une collection d’objectifs sans moyens. On se réjouit qu’il soit fait mention dans le volet opérationnel de « pérenniser la dynamique » et de réaliser « un déploiement modulable de la stratégie » entre 2020 et 2025. Les modalités de ce déploiement ne sont pas précisées alors que ce devrait être l’objet de la fiche…
Il est envisagé de créer un réseau de navettes fluviales sans autre précision…
En bref, aucun n’investissement n’est programmé dans ce domaine. Aucun calendrier prévisionnel n’a été établi. Les moyens humains prévus sont dérisoires (moins de 10 emplois etp).

 

AXE 3 ›› Développement des énergies renouvelables (EnR) sur le territoire

Il est cocasse de découvrir que la fiche 3.1 porte sur la création d’un schéma directeur énergie, alors que cela devrait normalement être l’objet de ce PCAET
A l’exception de la chaleur, il n’est pas prévu que la CU investisse elle-même dans une Société d’Economie Mixte pour produire des EnR, comme les y autorise la loi LTECV de 2015, ni qu’elle accroisse les subventions à l’efficacité énergétique et/ou à la production d’EnR.
Comme l’Etat l’indique dans son avis « Si le potentiel de développement des ressources thermiques alimentant des réseaux de chaleur a bien été étudié, il n’y a pas d’étude du développement de ces réseaux ». Or il souligne qu’il « est très fortement recommandé dans le plan d’actions de favoriser la connexion du bâti (résidentiel et tertiaire) à des réseaux de chaleur ». (Synthèse de l’Avis de l’Etat , p2)
La cartographie des réseaux de chaleur existants n’a même pas été dressée.
La fiche 3.3 évoque la possibilité de monter une coopérative de production d’EnR et de participer à son capital à hauteur de 50% max. Aucune échéance n’est donnée. Le coût n’est pas évalué.
Il est ainsi prévu d’installer des méthaniseurs mais aucune enveloppe budgétaire n’est précisée. (La fiche action ne fait que mentionner le coût unitaire du KW de puissance installée et la possibilité de recourir aux subventions de l’ADEME). Il est pourtant précisé que le temps de retour de ce genre d’opération est rapide… On se demande pourquoi les auteurs du document sont aussi réticents à s’engager à gagner de l’argent.
Concernant la récupération de la chaleur fatale, il est prévu de lancer une étude sur le potentiel de production ce qui normalement aurait dû être traité dans ce document. Là encore l’enveloppe budgétaire et le calendrier prévisionnel ne sont pas précisés.
Il est prévu de réorganiser la filière bois pour inciter les propriétaires de parcelles privées à les exploiter. Le système incitatif à mettre en place n’est pas précisé ni chiffré. En outre, il n’est pas fait mention de la construction de nouvelles chaufferies bois sur le territoire. Seul un vague objectif de « promotion du développement du réseau de chaleur incluant une part biomasse » est évoqué. Ces installations ont pourtant démontré leur rentabilité (cf. l’installation des deux chaufferies bois d’Achères)
Concernant le photovoltaïque, il est fait mention des deux projets en cours sur la plaine de Chanteloup et à Gargenville, sans évoquer le lancement de nouveaux. Il n’est question que de sensibilisation.
Il est prévu « d’initier des achats d’EnR groupés ». Hélas, rien n’indique dans le rapport quand s’arretera l’ « initiation ». Aucun objectif de résultat n’est précisé.
Il n’est pas envisagé d’accroître le potentiel de production d’hydroélectricité ni la géothermie, alors que le potentiel de la CU est important et que ces sources d’EnR sont très rentables. (C’est la raison pour laquelle Total et le syndicat intercommunal SEY envisage sérieusement d’investir dans des mini centrales hydrauliques en bord de Seine). L’Etat lui-même note dans son avis : que la géothermie, «cette énergie non délocalisable constitue une ressource à déployer »

AXE 4 ›› Développer une économie durable et inclusive, en mobilisant les acteurs économiques, les collectivités et les citoyens du territoire

Il n’est plus question de recyclage ni de récupération de la chaleur fatale, alors que le document stratégique prévoyait qu’elle représente 35% de la production des EnR produites sur le territoire dans le mix énergétique en 2050.
Là encore il n’est question que d’opérations de sensibilisation et de lancement de réflexions. L’autorité environnementale note «que ces actions restent au stade de déclarations d’intentions, car les actions ne sont pas toujours budgétées et les partenariats ne sont pas identifiés. »
De fait, aucune mesure concrète n’est avancée pour réduire les déchets (à l’exception de l’acquisition de 200 composteurs au bénéfice de la CU), pour favoriser leur recyclage (en subventionnant par exemple des recycleries ou des repair café…) pour offrir une alimentation bio et locale aux scolaires, ou même lutter contre le gaspillage alimentaire…
La CU devrait proposer l’instauration d’une redevance incitative, autrement dit une facturation de la collecte au poids des déchets non triés en lieu et place de la taxe sur l’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), notamment en zone pavillonnaire, puisque selon l’ADEME, un tel dispositif réduit en moyenne d’un tiers la collecte d’ordure ménagères par tête.
En matière de qualité de l’air, il est là encore prévu de sensibiliser les publics et d’installer des capteurs pour un coût de 10 000€. Rien n’est prévu pour réduire ces pollutions…
L’autorité environnementale note « l’absence d’actions en faveur de la réduction des nuisances sonores sur les infrastructures existantes ». Qui sont pourtant l’une des premières causes de morbidité en Ile de France.

 AXE ›› Accompagner l’évolution des modes de production agricoles et d’alimentation et adapter le territoire aux changements climatiques.

A part un point sur la végétalisation des zones urbaines et de la désartificialisation des sols, rien de bien concret n’est mentionné dans le plan.
La CU pourrait instaurer des aides complémentaires à la reconversion des exploitations vers l’agriculture biologique
L’autorité environnementale déplore l’absence d’analyse récente et des impacts de l’étalement urbain sur la biodiversité.

En conclusion, la CU a mis près de 6 ans à établir une PCAET qui se fixe des objectifs de résultats totalement insuffisants au regard des cibles fixées par la loi, sans aucune obligation de moyen. L’autorité environnementale note d’emblée « qu’il manque d’ambition en matière d’énergie (développement des énergies renouvelables, baisse de la consommation dans les bâtiments), car les objectifs du PCAET de la CU GPS&O sont en deçà des objectifs nationaux et régionaux. De plus, au-delà des grands principes qu’il adopte, l’efficacité de ce plan pour atteindre les objectifs visés n’est pas suffisamment démontrée ». Ses fiches actions recommandent des opérations de sensibilisation qui sont déjà mises en œuvre sur le territoire depuis plus de 15 ans pour la plupart. Ces fiches recommandent la réalisation d’études technico-économiques qui auraient dû figurer dans ce document. C’est à se demander sur quelle base les auteurs se fondent pour établir leurs recommandations. Faute d’estimation des potentiels, des coûts et du retour sur investissement de la production d’EnR, il est même étonnant que le prestataire ait pu établir un mix énergétique prévisionnel en 2050…

Ce document est en soit une performance : C’est le PCAET le moins contraignant et le moins cher de France. Il comporte des centaines de pages sans rien proposer de concret. C’est un splendide monument de « green washing ». De la part de la plus grande Communauté Urbaine de France, c’est totalement désolant…

 

Les élus d’Ici-Conflans !